Marchés publics : le Tessin pour modèle

La loi fédérale révisée sur les marchés publics (LMP), qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021, constitue une opportunité pour les maîtres d’ouvrage et les entreprises de construction. Mais pour cela, il est nécessaire que le changement de paradigme soit appliqué de manière globale et efficace. Le directeur de la SSE demande aux cantons de prendre modèle sur le Tessin. 
 
 
Les constructions de qualité sont dans l’intérêt de la population suisse. En effet, c’est elle qui finance les mandats par le biais des impôts. Jusqu’à présent (et jusqu’à la fin de l’année), la qualité n’a toutefois joué qu’un rôle mineur dans les appels d’offres. En effet, le prix était le critère d’adjudication déterminant. En règle générale, les prestataires proposant le prix le plus bas se voyaient attribuer les mandats. Cependant, si une offre assortie d’un prix trop bas est choisie, on ne peut pas vraiment parler d’une « utilisation parcimonieuse des deniers publics ». Au final, ce sont des prix adaptés et corrects qui permettent de réaliser des économies à moyen et long terme, notamment eu égard aux coûts du cycle de vie. Dans le même temps, les mandats doivent être attribués aux entreprises adoptant un comportement correct : leurs collaborateurs doivent être rémunérés conformément aux prescriptions légales et elles doivent s’acquitter de leurs cotisations sociales et de leurs impôts. L’attribution de mandats publics aux entreprises exerçant leur activité de manière rigoureuse est donc un acte de responsabilité sociale et économique. La guerre des prix est destructrice pour les entreprises de construction. Depuis des années, elles génèrent en moyenne une marge d’environ 2 %, ce qui est très bas par rapport à d’autres branches. À titre de comparaison, les entreprises du secteur des machines, de l’électrotechnique et de la métallurgie affichaient en 2018 une marge de 8 à 15 %.  
 
Désormais, la qualité paye 
Les maîtres d’ouvrage n’ont pas profité de cette guerre des prix. Ils obtenaient la variante la moins coûteuse. Le Parlement a tenu compte de la situation et a donc approuvé un changement de paradigme l’année dernière. Désormais, ce changement doit entraîner une concurrence axée sur la qualité. Au niveau national, la loi fédérale révisée sur les marchés publics entrera en vigueur le 1er janvier 2021. « Le changement de paradigme est une opportunité non seulement pour les entreprises de construction, mais aussi pour les maîtres d’ouvrage », précise le directeur de la SSE Benedikt Koch. 
 
Une obligation pour les cantons et les communes 
Dans un premier temps, le nouveau droit des marchés publics s’appliquera uniquement au niveau fédéral. Les cantons et les communes ont toute latitude pour fixer la date d’application de l’Accord intercantonal révisé sur les marchés publics (AIMP), qui a été adopté le 15 novembre 2019. Jusqu’à présent, la plupart des cantons ne se sont pas précipités pour appliquer ce texte.  
 
Seuls les cantons de Berne, d’Argovie, de Bâle-Ville et de Schwytz ont commencé à apporter des adaptations. « Désormais, les cantons et les communes doivent agir et passer à la vitesse supérieure », insiste Benedikt Koch. Il ajoute : « Le changement de paradigme doit être appliqué complètement et efficacement. Il doit être mis en œuvre le plus rapidement possible. » Dans cette optique, la SSE ne participe à pas moins de cinq groupes de travail, comme l’indique Benedikt Koch. La mise en œuvre requiert impérativement que tous les acteurs (maîtres d’ouvrage, planificateurs et entrepreneurs) aillent dans la même direction. Il faut encore travailler sur ce point. Selon Benedikt Koch, il est essentiel que le nouveau droit des marchés publics soit conçu pour permettre la participation des petites entreprises. « La SSE s’oppose à de nouvelles certifications et à de nouveaux certificats qui entraînent des coûts et des tâches administratives supplémentaires », précise Benedikt Koch. 
 
Plausibilité de l’offre / fiabilité du prix 
Selon Benedikt Koch, les cantons doivent prendre modèle sur le Tessin dans le domaine des critères d’adjudication. La plausibilité de l’offre et la fiabilité du prix y occupent une place centrale. La plausibilité de l’offre est le critère qui relativise le prix. Dans le domaine des prix, le niveau nominal n’est pas l’unique facteur important. Les offres reçues sont en effet rassemblées dans l’ordre. Les offres présentant un grand écart par rapport au niveau médian des offres reçues (à la hausse ou à la baisse) perdent des points dans le domaine du prix. Au Tessin, cette méthode utilise également un prix de référence du donneur d’ordre. Ce procédé, qui a fait ses preuves, est également conforté par la jurisprudence.  
 
La LMP révisée, un soulagement à court terme 
À moyen et long terme, la révision de la loi sur les marchés publics sera avantageuse pour les contribuables, les maîtres d’ouvrage publics et les entreprises de construction. 
À court terme, le changement de paradigme se produit à un moment opportun pour les entreprises de construction. La crise du coronavirus a provoqué un fort ralentissement dans le secteur de la construction. À cause de la pandémie, les entreprises ont déjà perdu jusqu’à présent 1,2 milliard de francs de chiffre d’affaires. L’activité de la construction est actuellement en recul. En raison des faibles marges évoquées précédemment, les entreprises de construction n’ont pas généré de gros profits même quand les carnets de commandes étaient pleins. L’existence même de certaines d’entre elles est compromise. Une perspective sombre pour l’économie suisse : dans le secteur principal de la construction, 300 000 emplois dépendent indirectement des processus en aval.  

A propos de l'auteur

pic

Schweizerischer Baumeisterverband

[email protected]

Partager l'article