Un monument fait peau neuve

Pour qu’une construction historique soit armée pour l’avenir, il faut beaucoup de travail et un savant mélange d’expertise, d’expérience et d’engagement – telle est la perspective du conducteur de travaux.

Le viaduc de la Sitter est un des plus célèbres ponts ferroviaires de Suisse. Classé monument historique, cet ouvrage d’art techniquement impressionnant – le plus long pont à voie métrique du pays – jouit d’un rayonnement plus que régional. Vieille de plus de 120 ans, la structure du viaduc affiche cependant des signes de faiblesse. «Après tant d’années d’utilisation, il n’est pas étonnant de constater certains dommages», explique Benedikt Lipp, chef de la section Infrastructures de l’entreprise Cellere Bau AG en charge de la rénovation. En tant que chef de projet, il travaille en coulisses, mais non sans assumer toutes ses responsabilités.

Si la rénovation aurait pu attendre encore un peu, elle a été entamée dès à présent afin de bénéficier de synergies opérationnelles du fait de la fermeture totale du pont routier voisin.

Le défi d’un patrimoine à protéger

L’état exact de la structure en béton a dû être au préalable clarifié. Ce n’est qu’après avoir retiré l’enveloppe de béton projeté, qui datait des années 1960, qu’il a été possible d’établir un diagnostic pour la structure porteuse: état critique par endroits. «La dégradation continue de la surface du fait des intempéries – gel et infiltration de l’eau notamment – a sensiblement affaibli le béton compacté», explique Benedikt Lipp.

Les grands moyens

Le temps était venu pour le conducteur de travaux et son équipe de passer à l’action. Le chantier se divisait en plusieurs étapes. Après une phase de préparation, une phase intense de quatre semaines a été menée, avec fermeture totale du trafic, pendant laquelle le ballast et les rails ont été entièrement renouvelés. Une impressionnante grue mobile de 500 tonnes a joué les premiers rôles pour le remplacement du bac à ballast, aidée en ça par d’autres grues. Pour tenir les délais, cette phase a nécessité la rotation de deux équipes travaillant six jours par semaine, impliquant près de 50 personnes au total.

La phase suivante consistait à préparer la façade, remplacer le béton projeté et appliquer un enduit spécial. Il était à ce stade particulièrement important de conserver l’aspect originel d’un monument protégé. Il a par exemple fallu utiliser du granit pour les finitions de l’arête supérieure, ainsi qu’un enduit spécial et un film protecteur anti-graffitis répondant aux exigences de la protection du patrimoine.

La rénovation du viaduc a été finalisée avec succès et la livraison mi-juillet a donné entière satisfaction aux chemins de fer d’Appenzell, maîtres d’ouvrage du projet. Le travail n’est toutefois pas complètement fini. Il faut encore terminer d’ici au mois d’octobre les travaux de protection anticorrosion du pont routier.

Un défi gratifiant

«Pour diriger un tel projet, il faut beaucoup d’années d’expérience en matière de calculs, d’acquisition et de mise en œuvre», souligne Benedikt Lipp. Les projets de pareille envergure peuvent certes être planifiés dans les grandes lignes, mais le processus de construction exige toujours de la flexibilité et des connaissances techniques approfondies – du niveau du contremaître à celui du conducteur de travaux.

Rétrospectivement, Benedikt Lipp peut se féliciter du travail accompli. Lorsque la planification est bonne et l’expertise est là, des projets gigantesques peuvent être menés à bien en très peu de temps et offrir une nouvelle jeunesse à des édifices historiques. «C’est une incroyable satisfaction», confie-t-il.

Il n’est pas dit que d’autres secteurs d’activité apportent ce même degré de satisfaction. Et c’est une des raisons pour lesquelles Benedikt Lipp recommande si chaleureusement les métiers de la construction. «Avec du travail, de l’engagement et un peu de matière grise, une carrière dans la construction peut s’avérer aussi lucrative que passionnante.»