Le BIM permet de sortir des modèles de travail en silos

Très engagée pour soutenir les entreprises de construction dans leur transformation numérique, la SSE a participé activement au Digital Construction Day, qui a eu lieu le 16 mars. 
 
Plusieurs tables rondes étaient organisées dans le cadre de cette manifestation, auxquelles différents représentants de la SSE ont pris part. C’est notamment le cas de Martin Graf, responsable gestion d’entreprise et vice-directeur de la SSE, qui a participé à une discussion sur le thème de la collaboration en open BIM en Suisse romande. Comme il l’a souligné dans son intervention : « Le BIM progresse beaucoup actuellement, et certains acteurs privés sont même parfois en avance par rapport au domaine public. Ceci étant, il faut que les maîtres d’ouvrage publics donnent l’impulsion, afin que les petites entreprises privées voient aussi une raison de prendre le train en marche et évitent de se retrouver seules sur le quai. Ce qui ne veut pas dire qu’elles doivent tout intégrer du BIM. Au contraire, elles doivent plutôt s’interroger sur les aspects de la transformation numérique qui font sens pour elles et qu’elles devraient intégrer. C’est aussi dans cette direction que nous souhaitons les accompagner au travers de notre programme Entrepreneur 5.0. » 
 
Du mouvement du côté des CFF et de la KBOB 
Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les impulsions des grands maîtres d’ouvrage publics sont en train d’arriver. Ainsi, depuis le début de cette année, les CFF passent tous leurs projets immobiliers à partir de cinq millions de francs en BIM. Les choses bougent aussi du côté de la KBOB (Conférence de coordination des services de la construction et des immeubles des maîtres d’ouvrage publics), qui vient de publier un document consacré à l’application de la méthode BIM aux prestations de mandataires généraux dans le secteur du bâtiment et aux exigences d’information du mandant (EIR). « Nous avons formulé ce document de façon simple et l’avons limité aux prestations ordinaires requises par la SIA, afin de le rendre aussi clair et compréhensible que possible. Dans le même esprit, nous l’avons limité aux cas d’usage de base », a souligné Anna Wimmer, responsable des projets de numérisation à la KBOB. Cette dernière a également précisé que la KBOB allait développer deux de ces cas d’usage – quantités et coûts, ainsi que volumes et métrés – au cours de cette année, afin de permettre une compréhension et une approche communes pour tous les adjudicateurs publics. Sans oublier de rappeler que le but poursuivi était d’accroître la valeur du portefeuille immobilier des maîtres d’ouvrage, notamment en matière de planification, de gestion des risques, de durabilité, d’entretien et de sécurité. 

Une plus-value tout au long du cycle de vie 
Du côté de Genève, l’Etat est aussi très actif, comme l’a expliqué son représentant Laurent Niggeler. « Nous voulons faire avancer la Genève numérique et nous positionner au travers de cas d’école. Le but est aussi de créer des facteurs engageants qui donnent une orientation aux privés. » Ainsi, la plateforme BIM de l’Etat de Genève est développée autour de quatre de ses missions.  A commencer par son rôle d’autorité de contrôle, pour tout ce qui concerne les permis de construire. Les maquettes numériques doivent également soutenir l’Etat de Genève dans son rôle de gestionnaire du patrimoine en permettant de mieux le rationnaliser, tout comme le BIM doit permettre d’établir une connexion et un langage commun entre le monde de la construction et celui du territoire. Bien entendu, l’Etat assume également une mission d’information, et le BIM permettra à cet égard de mettre à disposition des informations utiles à toutes les parties prenantes. « Les maquettes en 3D permettent par exemple de visualiser les contraintes et les problèmes, et donc de les corriger en amont. Mais disposer de données structurées est utile tout au long de la chaîne de la valeur, y compris au niveau de l’entretien et du facility management. » 

L’expérience française 
Représentant de buildingSMART France, Pierre Mit a évoqué le changement d’état d’esprit intervenu en France il y a une dizaine d’années, et qui a permis au BIM de « décoller » dans l’Hexagone. « Les parties prenantes ont intégré le fait que ce qui faisait la valeur du BIM, c’étaient les données et non les images, comme beaucoup le pensaient jusque-là. Différents acteurs se sont lancés dans l’aventure BIM et ont joué le jeu en partageant leurs retours d’expérience, y compris avec leurs concurrents. Au début, les plus grands groupes du pays faisaient chacun du BIM de leur côté, avant de se rendre compte qu’ils avaient énormément de choses en commun et travaillaient pour les mêmes maîtres d’ouvrage. C’est là que chacun s’est rendu compte qu’il ne servait à rien de faire du BIM tout seul. Car le BIM permet précisément de sortir des modèles de travail en silos pour développer la collaboration entre tous les acteurs. » 

Billal Mahoubi, responsable processus et directives BIM aux CFF abonde : « l’open data est une culture qui est en train de s’installer aux CFF. Nous avons beaucoup de parties prenantes et de systèmes différents. La solution n’est donc pas d’interdire aux différentes de parties de travailler avec leurs plateformes, mais au contraire de travailler en open data afin de développer la collaboration. » 

Sortir du modèle SIA 112 
La collaboration restera donc comme l’un des mots-clés de cette table ronde. Pour qu’elle fonctionne, il ne s’agit pas uniquement d’uniformiser des données. « Il faut réfléchir au modèle dans son ensemble, et il est impératif d’intégrer toutes les parties prenantes dès le départ. Ce qui implique notamment de sortir du modèle SIA 112, qui est structuré en silos. Que l’entrepreneur ne soit impliqué qu’à partir de la phase 5 est absurde. Pour pouvoir construire mieux, plus efficacement et rapidement, mais aussi plus durablement et moins cher, tout en limitant les risques et en favorisant l’innovation, il faut au contraire que les entrepreneurs soient impliqués dès le départ. », explique Martin Graf. « Car la transformation numérique est avant tout un changement d’état d’esprit et de culture. La technologie n’est qu’un outil au service de cette nouvelle culture visant à favoriser la collaboration et ainsi amener une valeur ajoutée à toutes les parties prenantes. » 

A propos de l'auteur

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Zafer Bakir

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