BIM et développement durable:

jeudi, 14.3.2024 | 06:00

Une synergie pour l’avenir de la Construction

En Suisse, le secteur de la construction est confronté à d’importants défis écologiques. Il joue un rôle décisif dans le débat sur l’environnement en tant que principal responsable de plus de 80 % de la production de déchets et de 38 % des émissions de CO2 dans le pays. La méthode traditionnelle de planification continue s’avère souvent inefficace, entraîne un gaspillage de ressources et contribue de manière déterminante à ces chiffres élevés de la pollution.

Source: globalabc.org

Le concept de développement durable repose sur trois piliers: écologie, économie et responsabilité sociale.

Nous mettons l’accent sur la dimension écologique, qui inclut la réduction de la pollution environnementale et une gestion responsable des ressources. Contrairement à l’hypothèse répandue selon laquelle le Building Information Modeling (BIM) fait augmenter les coûts totaux d’un projet de construction, il s’avère que l’utilisation de la méthode BIM permet effectivement d’augmenter l’efficacité écologique et économique. Des processus de planification plus précis et une utilisation plus efficace des ressources permettent à la fois de réduire l’empreinte écologique et d’économiser des coûts. Ci-après, nous vous présentons quelques exemples internationaux et observons comment la situation se présente chez nous en Suisse.

Projet Chengdu-Yibin Expressway

Source: Avec l’aimable autorisation de Sichuan Road and Bridge (Group) Co., Ltd.

Le projet Chengdu-Yibin Expressway, réalisé par Sichuan Road and Bridge (SRB), en est un exemple remarquable, qui pose de nouveaux jalons en matière d’autoroutes intelligentes dans la région. Ce projet comprend la construction d’une autoroute de 155 kilomètres à travers un paysage montagneux de Chine, comprenant 154 ponts, quatre tunnels, 17 nœuds de communication et cinq zones de service. Le défi consistait à construire en trois ans un axe de transport sûr, confortable et moderne, qui répond à des exigences strictes en matière de protection du paysage et de l’environnement.

La société SRB a utilisé la méthode BIM tout au long de l’itinéraire afin d’améliorer l’efficacité dans les domaines de l’inspection, de la conception, de la production et de la gestion. Pour ce faire, elle a développé une plateforme basée sur le cloud pour la gestion de la construction et de l’information et établi une usine intelligente pour la fabrication de poutres métalliques. L’utilisation du BIM et des applications de Reality Modelling a été décisive pour résoudre de nombreux problèmes tels que la visibilité aux 17 nœuds de communication et les processus inefficaces dans la fabrication de poutres métalliques.

Grâce aux logiciels OpenROAD et LumenRT de Bentley Systems, SRB a pu modéliser, inspecter et visualiser la conception de l’autoroute. Cela a permis de réduire les risques de circulation et d’accroître la sécurité. Le développement d’une plateforme de gestion des travaux a également permis d’optimiser les plans de construction, de coordonner les calendriers et les processus de travail, ce qui a permis d’avoir une meilleure vue d’ensemble des différentes phases de construction.

L’utilisation du BIM a permis à SRB d’identifier au total plus de 103 problèmes de conception potentiels, ce qui a permis d’économiser 4,5 millions de CNY sur les coûts de construction. De plus, des inspections et simulations numériques ont permis de résoudre plus de 14 problèmes de visibilité potentiels, ce qui a permis d’économiser 7 millions de CNY supplémentaires. Au total, la numérisation du projet a permis à SRB d’économiser 17,5 millions de CNY (env. 2,45 millions de CHF), de raccourcir la durée des travaux de 124 jours et de réduire les coûts de production de 6 millions de CNY.

En supposant qu’un chantier moyen émet environ 20 tonnes de CO2 par jour, le projet Chengdu-Yibin Expressway représente une économie d’

2’480 tonnes de CO2.

Cette estimation résulte du raccourcissement de la durée des travaux de 124 jours.

Source: BOB AG

BOB AG: immeubles de bureaux durables

Un autre exemple remarquable est la société BOB AG, qui se consacre à la construction d’immeubles de bureaux durables et économes en énergie. En développant un modèle de série pour immeubles de bureaux, BOB AG a réussi à standardiser les composants standard et à les réutiliser dans de nouveaux projets. Cette approche permet de réduire la consommation d’énergie jusqu’à 50 % par rapport aux bâtiments conventionnels.

Les coûts énergétiques d’une réalisation BOB ne représentent que la moitié de ceux d’un nouvel immeuble de bureaux conventionnel.

Dr. Bernhard Frohn

BOB AG

En ce qui concerne les besoins énergétiques, BOB AG attache une grande importance à la protection active du climat et à la préservation des ressources. Des simulations détaillées à l’aide de la méthodologie BIM et de différents paramètres environnementaux permettent d’optimiser les besoins énergétiques d’un bâtiment pour le chauffage, le refroidissement, la ventilation et l’éclairage. BOB AG veille à ce qu’aucun combustible fossile ne soit utilisé pour la production d’énergie. Cela contribue à la neutralité climatique des bâtiments. En outre, chaque bâtiment BOB dispose d’un système qui surveille en temps réel le respect des objectifs d’économie d’énergie.

Mais que fait la Suisse?

En Suisse, plusieurs projets associent avec succès le BIM et le développement durable. Le projet «BIMwood» dirigé par la Haute école spécialisée bernoise (BFH) en est un exemple. Ce projet se concentre sur les processus de planification basés sur le BIM dans la construction en bois et s’attaque aux défis des produits préfabriqués dans la construction en bois, notamment en ce qui concerne la prise en compte de la fabrication et du montage au début de la conception. L’objectif est d’optimiser les processus de la construction en bois afin de contribuer aux objectifs climatiques du Conseil fédéral d’ici 2050. Le projet «BIMwood» développe de nouvelles approches de planification dans les préfabriqués en bois en utilisant le principe du design pour le Manufacturing and Assembly (DfMA). Cette approche permet d’intégrer les connaissances nécessaires des phases ultérieures dans les phases antérieures et d’orienter la planification vers les logiques de la préfabrication d’éléments de grand format dans la construction en bois.

Source: www.fhnw.ch

Un autre exemple est le programme greenBIM de l’Institut für Nachhaltigkeit und Energie am Bau (INEB) de la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse (FHNW). L’objectif de ce programme est de mettre à la disposition des architectes et des planificateurs des applications BIM leur permettant d’évaluer et d’optimiser les aspects de durabilité dans leur environnement de planification. Un élément important du programme est un Revit-Plug-in qui permet de vérifier l’énergie grise et les émissions de gaz à effet de serre d’un avant-projet. L’outil repose sur une base de données intégrée d’éléments de construction et donne un feed-back direct au moyen de valeurs de référence (benchmark) relatives aux éléments de construction et aux bâtiments. Il aide les planificateurs à prendre des décisions qui contribuent au développement durable du projet dès la phase de conception.

Ces exemples montrent comment la Suisse adopte des approches innovantes dans le domaine du BIM et du développement durable pour rendre la construction plus efficace, plus respectueuse de l’environnement et plus durable.

On voit que le BIM et le développement durable sont étroitement liés.

Grâce à une planification, une mise en œuvre et une gestion optimisées des projets, que ce soit dans le bâtiment ou dans la construction d’infrastructures, le potentiel d’économie de ressources est énorme et l’augmentation de l’efficience considérable. Par conséquent, l’empreinte écologique du secteur de la construction ne cesse de s’améliorer.

Un élément clé de ces efforts est l’introduction de nouveaux critères d’adjudication dans les appels d’offres publics, qui prennent davantage en compte les aspects du développement durable. Citons comme exemple la plateforme de connaissances sur les achats publics responsables (PAP) soutenue par la Conférence des achats de la Confédération (CA) et la Conférence de coordination des services de la construction et des immeubles des immeubles des maîtres d’ouvrage publics (KBOB) en collaboration avec la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l’aménagement du territoire et de l’environnement (DTAP), l’Association des Communes suisses (ACS) et l’Union des villes suisses (UVS). Cette plateforme sert de portail central d’informations et d’outils sur les marchés publics durables.

Un autre exemple est la Charte pour une construction circulaire,

signée par douze des principaux maîtres d’ouvrage publics et privés de Suisse. Cette charte vise à réduire l’utilisation de matières premières primaires non renouvelables à 50 % de la masse totale d’ici 2030 et à faire baisse de façon sensible les émissions indirectes de gaz à effet de serre. Elle vise en outre une amélioration considérable de l’économie circulaire en cas de rénovation et de construction neuve. Les signataires de la Charte, parmi lesquels de grandes entreprises et des institutions publiques, se sont engagés à développer des solutions innovantes pour atteindre ces objectifs. Citons par exemple les rénovations plutôt que les nouvelles constructions et la réduction de la consommation de matériaux.

Ces mesures montrent que la Suisse travaille activement à rendre le secteur de la construction plus durable. Elle emprunte de voies nouvelles pour ses marchés publics et assure la promotion de l’économie circulaire.

Conclusion:

En conclusion, le secteur de la construction prend de plus en plus conscience de la nécessité d’un développement durable écologique et prend activement des mesures. Le Building Information Modeling (BIM) joue ici un rôle central, car il offre des avantages non seulement écologiques, mais aussi économiques. Il reste encore beaucoup à faire, mais la direction est claire: l’objectif est de rendre le secteur de la construction plus respectueux de l’environnement, plus efficient et plus durable.