CO2: séquestrer plutôt qu’émettre

Pour protéger le climat, il est indispensable de capter le CO2 contenu dans l’atmosphère et de le «séquestrer» à long terme. Une mission qui incombe aussi à la construction.

 

La Suisse, comme le monde entier, continue à émettre bien trop de CO2. Il faut donc mettre au point des stratégies et des procédés pour extraire du CO2 de l’atmosphère terrestre. Ces technologies d’émission négative (NET) peuvent contrebalancer les émissions de gaz à effet de serre restantes, et contribuer ainsi à freiner le réchauffement climatique. Le secteur de la construction a ici un rôle clé à jouer, car le béton et d’autres matériaux pourraient, par leur masse, séquestrer une part considérable du dioxyde de carbone atmosphérique. À la fin de leur «vie», les matériaux qui contiennent du carbone pourraient, après avoir été recyclés plusieurs fois, être finalement mis au rebut et constituer des puits de carbone.

Un projet de l’Empa intitulé «Mining the Atmosphere» étudie différentes méthodes pour transformer le CO2 en matériaux valorisables susceptibles de remplacer les matériaux de construction courants.

Quelques entreprises suisses ont déjà mis au point de nouveaux matériaux qui fixent le CO2 et pourront ainsi participer au grand nettoyage de l’atmosphère. En voici quelques exemples.

 

Cinq entreprises familiales, une même mission

Cinq entreprises familiales, Grisoni-Zaugg SA, JMS-Gruppe (Johann Müller AG), Kästli Bau AG, Lötscher Plus Gruppe et Eberhard Bau AG, ont fondé la société Zirkulit Beton AG pour ensemble stocker du CO2 dans du béton recyclé. Objectif: fixer chaque année 25 000 tonnes de CO2 dans du béton dans l’ensemble de la Suisse. Le béton Zirkulit a été mis au point par les entreprises Eberhard AG et Kästli AG. La technologie de stockage du CO2 développée par Zirkulit AG permet de séquestrer au moins 10 kg de CO2 par mètre cube de béton Zirkulit. En effet, le béton issu de recyclage a la capacité de stocker du CO2 dans ses pores. Par une réaction chimique, le CO2 se retrouve piégé sous forme de calcaire. L’entreprise Zirkulit AG a développé une technologie pour tirer parti de cette propriété du granulat de béton et séquestrer ainsi du CO2. Comme l’indique son nom, Zirkulit est un béton circulaire comportant le plus possible de matières secondaires. Par ailleurs, la teneur en ciment de ce produit est minimale. Seuls des ciments de grande qualité sont utilisés.

 

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Klark, un béton contre le changement climatique

L’entreprise de construction Zindel United, entreprise familiale dirigée par la huitième génération, s’engage en faveur de la construction durable sur plusieurs plans, ce qui lui a valu le Prix SVC Suisse orientale 2024. «En réaction logique au changement climatique et à la raréfaction des ressources, Zindel United travaille délibérément en circuit fermé, en se concentrant sur les matières premières locales. Avec le premier béton de Suisse dont la neutralité en matière de CO2 a été prouvée, l’entreprise apporte une contribution importante à la réalisation des objectifs climatiques 2050», a écrit le Swiss Venture Club SVC pour la remise du Prix SVC Suisse orientale 2024. Ce béton, baptisé Klark, fixe le CO2, car il comporte une part de charbon végétal provenant de bois local. Il a les mêmes propriétés techniques que le béton traditionnel et peut être recyclé à plusieurs reprises sans que le CO2 séquestré soit libéré. L’ajout de charbon végétal permet à Klark de séquestrer de manière durable 200 kg de CO2 par mètre cube de béton, ce qui transforme de fait le bâtiment en puits de carbone. Sa composition, définie au cas par cas en fonction des exigences de chaque projet de construction, permet d’obtenir un produit à faibles émissions de CO2, voire neutre en carbone. Klark est fabriqué par les sociétés Logbau (qui appartient à Zindel United), par Aarebeton Aarau AG et Ulrich Imboden AG.

 

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Stockage efficace

Neustark est une jeune entreprise fondée en 2019 sous forme de spin-off de l’EPF de Zurich. Elle a mis au point une solution permettant de stocker durablement du CO2 biogène dans des déchets minéraux recyclés comme le béton de démolition. L’objectif, ambitieux, est de retirer d’ici 2030 un million de tonnes de CO2 de l’atmosphère. «Nous utilisons la technologie de minéralisation, dans laquelle le CO2 réagit avec le béton de démolition pour se transformer en calcaire qui se fixe de manière permanente à la surface des granulats. La technologie de minéralisation garantit cette fixation permanente pour plusieurs centaines de milliers d’années. Le béton de démolition enrichi en CO2 peut être utilisé pour fabriquer du béton recyclé, dont il peut constituer jusqu’à 75%, selon le type de béton», explique Elmar Vatter, responsable communication de Neustark. Le béton recyclé enrichi en CO2 peut également servir de substitut au gravier dans la construction des routes. Neustark a conclu des partenariats avec différentes entreprises, dont la société Kibag AG.

 

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Le nouveau procédé de Holcim

Holcim utilise un nouveau procédé pour stocker durablement du CO2 dans du granulat de béton recyclé. Le dispositif mobile permet de fixer chaque année 500 tonnes de CO2 dans le béton Holcim ECOPact RECARB, ce qui améliore son bilan environnemental et économise les ressources naturelles. Cela correspond à peu près au CO2 absorbé chaque année par 25 000 sapins suisses.

 

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Susanna Vanek

Rédactrice

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